jeudi 18 juin 2020


Reportage: Phénomène des congés anticipés. Dabou, la ville hantée par laviolence des congés anticipés


  Châteaubriand, lun des collèges privés les plus prisés de Dabou nest pas en marge du phénomène des congés anticipés, malgré son paisible et beau cadre, ses bâtiments neufs aux couleurs joviales, sa belle pelouse, et son corps éducatif engagé. Lun des élèves de cette école a été arrêté par la police puis fait prisonnier durant plusieurs jours. Cétait à lissue des manifestations orchestrées en collaboration avec des élèves dautres établissements de la ville pour aller plus tôt en congés, en décembre 2017. 
    Trois ans après, il est exactement midi et le soleil est au zénith quand nous arrivons dans le collège, théâtre des évènements. Des élèves en uniforme, bleu-blanc pour les filles et le kaki pour les garçons, repartis en une vingtaine par classe sempressent de copier les lignes du dernier cours de la matinée lorsque retentit la sirène marquant la fin des cours. Une fois sortis de classe, de petits attroupements se forment par affinité et se dirigent vers le portail principal, dans une atmosphère de cris, rigolades et éclats de rire. Nous avons tendu notre microphone à quelques élèves pour comprendre les manifestations de ce phénomène. « Les congés anticipés nous donnent du fil à retordre, durant toute lannée scolaire. Ce problème nous met en retard sur le programme normal des cours. Parfois, les sujets des examens de fin dannée nont pas été vus en classe à cause des perturbations dues aux congés anticipés. Et, cela dépeint sur les résultats de fin dannée et le taux de réussite aux examens », déplore Dja Victor, élève en classe de 3ème 4, sur un ton à la fois damertume et de colère. Comme lui, certains élèves évitent désormais dêtre des acteurs de ce phénomène et se préoccupent de son impact négatif sur leur cursus scolaire, de même que sur leur vie en général.  
   Cest le cas dOkobé Asy Bala Jeannette, élève en classe de 2ndeA1 : « Jamais je ne serai une actrice ou participante dune manifestation de ce genre. Je ne veux pas risquer ou gâcher ma vie. Mes parents paient cher pour mes études », prévient-elle, en soutenant : « Lun des élèves de ce collège a fait la prison pour avoir participé à une manifestation des congés anticipés. Je ne veux pas finir comme lui !». 
    Ces évènements datent du vendredi 11 décembre 2017. Date à laquelle les acteurs de ce fléau ont pris dassaut les établissements secondaires publics comme privés, à Dabou. Dans leuphorie et lincivisme, ces manifestants se sont mis à déloger les élèves des autres établissements de leurs salles de classe. Munis de gourdins, briques, cailloux et armes blanches, ils détruisaient des biens publics et privés sur leur passage. « Ce jour-là, Dabou était sens dessus dessous, la population ne savait plus à quel saint se vouer à cause de la violence qui régnait sur la ville », se souviennent encore les élèves de Chateaubriand où, tout comme dans dautres établissements, ladministration et certains élèves se sont farouchement opposés aux manifestants. « Etant dans un établissement privé, nous ne pouvons pas permettre une telle attitude chez nous. Et ce fameux 11 décembre, lun des manifestants a eu laudace de porter main à un professeur sans regret », se souvient Camille Lou Rydiouane.
   En dépit de la mise en garde des autorités, de lincarcération de certains acteurs et des pertes en vies humaines signalées dans dautres localités gagnées par ce phénomène, dautres élèves semblent prêts à tout pour récidiver. Généralement ce sont des élèves en classe intermédiaire qui donnent les premiers coups de sifflet marquant le début des perturbations : « Je participe aux manifestations des congés anticipés à chaque fois que loccasion se présente. Cest une manière pour moi de maffirmer et mexprimer en tant que femme. Cest loccasion de nous faire entendre. Mais pas forcément par la voie de la violence. Nous sommes même encouragés par certains membres du corps enseignant qui veulent plus de temps à passer dans leurs familles se trouvant à des milliers de kilomètres dici », confie Ange en classe de 4ème.
   Selon Isaac Makagnon, Educateur au Collège Châteaubriand, « lencadrement de lélève doit être ferme depuis la maison, pour que nous puissions le renforcer une fois à lécole. Pour mieux cerner ce fléau, afin de prétendre y mettre fin, il faudra une rencontre tripartite entre les parents, le corps éducatif et les élèves. Ces parties saccusent mutuellement dêtre le responsable du fléau. Chacun doit mettre balle à terre, pour, ensemble, trouver la solution idoine. Cest lavenir des élèves, des parents, des enseignants et de toute la société qui en dépend ». Pour le moment, Dabou continue de vivre tous les ans dans la hantise des violences pour les Congés anticipés. 
Melaine KONDON

mercredi 17 juin 2020

Billet: Décevant !


  Ainsi donc, chacun devient son propre chef ! Ils ferment leurs cahiers et livres pour décider de leurs congés à la place des autorités. Cest le phénomène des congés anticipés. En Côte dIvoire, ces dernières années, des élèves ne mettent plus en pratique les valeurs de civisme, de discipline et de respect de la hiérarchie. Pis, ils ne respectent même plus le calendrier scolaire établi par leur ministère Ils agissent à la place du ministre. Les décisions de lautorité ne sont point respectées, mais vivement contestées. Les esclaves sont sur les chevaux et les princes à terre ! Décevante, cette plaie béante qui affecte lavenir du pays.
Grâce Kouadio

Dossier: Les congés anticipés, un puits bien profond dans l'Ecole ivoirienne


  Reine Adon est élève au lycée Mamie Houphouët Fêtai de Bingerville, dans la banlieue abidjanaise, où elle reprend la classe de 3e. En dépit du confinement des populations en raison de la crise à Coronavirus, elle ne ferme pas ses cahiers : « Je mefforce à étudier au moins 10h par jour jusquà la rentrée », déclare-t-elle. A partir du programme détude quelle sest elle-même imposé, elle redouble defforts pour atteindre son objectif final qui est davoir son orientation, vu quelle fait pour la seconde fois la classe de 3e. Les interminables grèves, y compris celles du phénomène des « congés anticipés », lui ont beaucoup coûté. Et elle donnerait absolument tout pour ne plus subir les moqueries liées à son échec de lan dernier. 
   Contrairement à Reine, plusieurs élèves continuent dapprécier de manière démesurée les congés anticipés et oublient que ce phénomène peut avoir des conséquences assez graves sur leur avenir et sur celui de lécole ivoirienne dans son ensemble. Le phénomène des congés anticipés  le fait pour des élèves de perturber lécole et faire arrêter les cours plus tôt, avant la date des congés scolaires - a pris de lampleur ces dernières années. Les conséquences de ce délaissement consciencieux des cours sont catastrophiques. Car les meneurs auront beaucoup simplifié leurs manuvres, cela ne change rien au fait quils perturbent les cours dune manière ou dune autre.

Faible taux de réussite aux examens. Près de cinq ans maintenant que les élèves ivoiriens sont épris de cette opération aux s conséquences catastrophiques. En fait, les dégâts se font le plus remarquer en fin dannée. De 2015 à 2017 par exemple, le taux de réussite aux examens du BEPC et du baccalauréat sélève respectivement à 59,27% et 42,35% selon des statistiques de la Direction des Stratégies, de la Planification et des Statistiques (DSPS). Lécole ivoirienne a, réalisé, dans cet intervalle, des prouesses plutôt particulières dans le domaine de léducation. Mais les chamboulements survenus de 2018 à 2019 laissent sans voix. Les rendements obtenus tant par les élèves de la 3e que par ceux de la classe de Terminale connaissent des chutes respectives de 60,14% et 49,09 en 2018, et de 57,31% et 41,23% en 2019. On note une différence de 2,83% au Bepc et 4,86% au Bac.

Baisse du niveau des élèves. Le phénomène des congés anticipés doit interpeller les élèves sur leur avenir. Pourtant il leur procure de la joie. Cette insouciance dont ils font preuve vis-à-vis de cette situation place ce problème parmi les plus préoccupants du ministère de lEducation. Depuis 2011, le gouvernement fournit assez defforts pour renforcer léquipe pédagogique au sein de tous les établissements de la Côte dIvoire. Après des analyses bien poussées, il est ressorti cette difficulté pour les élèves, qui dans un premier temps, manquent de concentration pendant les cours, narrivent pas à les retenir et à bien les rendre lors des compositions. 

Mauvaise publicité. De la baisse du niveau des élèves aux tricheries en passant par le faible taux de réussite aux examens, on remarque un ternissement lent mais sûr de limage de notre système éducatif. Toutes ces conséquences discréditent lEducation ivoirienne. Le gouvernement semble avoir bien perçu ces déviations et met tout en uvre pour pallier une bonne fois pour toutes, ce problème qui évolue à une croissance fulgurante.

LEtat ivoirien face à la tricherie et à la fraude aux examens. Le phénomène des grèves et des congés anticipés, entre autres causes, conduit inévitablement les élèves à la tricherie. Ces habitués sadonnent à la facilité parce quincapables de donner des réponses quils nont pas connu dans les salles de classes. Heureusement que lEtat ivoirien a adopté face à cette délinquance, des mesures drastiques, à travers deux arrêtés relatifs à la fraude : Il sagit de larrêté interministériel n°0062 /MEN/MESRS/METFP/MCF/MFPRA du 25 juillet 2011 modifiant larrêté interministériel n°0047/MEN/MESRS/MEFP du 20 juin 1995 relatif aux sanctions en cas de fraude commise par les candidats et acteurs et portant régime des réclamations aux concours et examens organisés par le Ministère de lEducation nationale,              et de larrêté N°0074 /MENET-FP/DECO du 06 avril 2018 portant interdiction de support de communication numérique dans les centres pendant les examens et concours relevant du ministère de lEducation nationale de lEnseignement technique et de la Formation professionnelle.
   De plus, la ministre de lEducation nationale a mis en garde les élèves contre les cas de fraude, lors du lancement de la session 2018 des examens scolaires, le 24 mai à Alépé : « Désormais, cest la tolérance zéro », a-t-elle prévenu.



LUNESCO vole au secours de lEcole ivoirienne. Le gouvernement ivoirien nest pas seul face aux problèmes de lEcole ivoirienne. Pour un suivi plus approfondi du programme scolaire, lUNESCO a suggéré, comme solution, un ratio élèves/enseignant qui est, par définition, le nombre moyen délèves par enseignant dans un niveau denseignement donné, et pour une année scolaire donnée. Selon lUNESCO, un ratio normal est de 25 élèves par enseignant (voir site de linstitution). 
   Dans lune de ses études intitulées « Profil idéal dun enseignant au regard des lycéens dans lenseignement général public du district dAbidjan », Gboméné Hervé Zokou, docteur en sciences sociales de développement à lUniversité Félix-Houphouët Boigny de Cocody, explique comment la Côte dIvoire néglige cette proposition. Lauteur propose 60 élèves en moyenne dans le premier cycle et 50 autres élèves en moyenne dans le second cycle. Ce qui fait un total de 110 élèves par enseignant. Or lorsquon jette un coup dil aux effectifs délèves et denseignants enregistrés en 2018, soit 2.100.499 et 61.338, cela donne un ratio de 344 élèves par enseignant. 
   Autant deffort à fournir pour espérer venir à bout du phénomène des congés anticipés, un puits bien profond dans lEcole ivoirienne.
Dossier réalisé par
Diane Amon

CHRONIQUE: Le désordre à lécole, à qui la faute ?

  Dans cette société en pleine mutation, si lAfrique peine encore à prendre son envol dans le concert des grandes nations, cest parce que nos dirigeants nont pas encore compris que la formation efficiente de la jeunesse est la pierre angulaire de tout progrès.  Chez nous, en Côte dIvoire, la norme, ce sont les congés anticipés dans le système éducatif. Cette réalité némeut personne. Nos autorités semblent sy plaire. 
   Lannée dernière, nous avons assisté, comme des spectateurs attristés par le casting dun film dhorreur, à ces congés anticipés orchestrés par certains élèves en manque de repères.   A la fin de lannée académique, la Direction des Examens et Concours (DECO) a brandi, comme un trophée de guerre, le résultat. Il est sans appel : Plus 6.500 cas de fraude et de tricherie lors des examens à grand tirage. 
   A qui la faute ? A cette question de fond, il est difficile dapporter une réponse tranchée. Car, de toute évidence, nous avons laissé notre système éducatif entre les mains dune mafia appelée cyniquement Fédération estudiantine et scolaire de Côte dIvoire (Fesci).  Elle a la possibilité de gérer le calendrier scolaire selon les humeurs de ses leaders.  
   A qui la faute ?  Aucune idée. Parce que nous avons à la tête de nos institutions éducatives des personnes qui ne sont pas toujours des modèles. La faute nincombe sûrement pas à ces personnes qui ont leurs enfants ailleurs, dans les meilleures universités du monde, et qui gèrent notre éducation nationale. 
   A qui la faute ? Ce nest pas la faute aux parents non plus ! Certains dentre eux ne savent pas quun enfant, on léduque, on le nourrit, on lui donne des valeurs sociales pour quil ne soit pas une entrave à la vie communautaire. Ne leur demandez pas de faire ce quils ne savent pas !
                                                                                                 
                                                                                                                             Christian KOSSONOU

Interview

NDatin Koné (Fondateur de collège à Dabou) :  

« Les congés anticipés sont soutenus 
par des chefs détablissement ! »

  Grèves, manifestations, mouvements de foules. Voici le tumultueux quotidien des lycées et collèges de Dabou, chaque année avant le départ officiel pour les congés scolaires. Le mouvement des « congés anticipés » enclenchés par les élèves ne cesse de monter en puissance avec des élèves de plus en plus révoltés contre le calendrier officiel du ministère de lEducation Nationale. Cette situation déplorable sème la crainte au sein des établissements qui en paient les frais. M. NDatin Koné, Directeur et fondateur du Collège Châteaubriand de Dabou, nous en parle dans cet entretien. 

Monsieur le Directeur, selon nos informations, votre école vit aussi le phénomène des congés anticipés. A votre avis, quelles sont les raisons fondamentales qui poussent les élèves à réclamer des congés anticipés ?

NDatin Koné : Selon plusieurs élèves, les congés anticipés leur permettent de mieux préparer les fêtes. Ils trouvent également que le temps des congés est trop court dans le calendrier scolaire. 

Comment sorganisent ces mouvements dans votre collège ?
 NK: Par les téléphones portables, les élèves senvoient des messages et fixent un lieu de rendez-vous. Ensuite, ils se regroupent et arrivent dans chaque école choisie où à laide dun sifflet, ils alertent leurs camarades et leur demandent de sortir. Très souvent, les initiateurs lancent des pierres, des bouteilles, et brandissent des gourdins pour effrayer les élèves qui refusent de sortir des classes.

Lun de vos élèves a été arrêté et emprisonné à lissue de ces manifestations. Que sest-il passé exactement ?

NK: Effectivement, lun de nos élèves a été emprisonné mais reconnu non coupable après un procès au tribunal de Dabou. Il était accusé de destruction de biens publics pendant les manifestations pour des Congés anticipés. En ce qui nous concerne, nous navons fait que suivre la procédure judiciaire et essayé de calmer nos élèves qui voulaient passer par tous les moyens, y compris la violence, pour libérer leur camarade emprisonné. 

Les élèves sont-ils les uniques commanditaires de ses mouvements ? 

NK : Malheureusement non, ils sont soutenus par certains chefs détablissement. Lannée dernière, il y en a un qui a été pris en flagrant délit dincitation à ces violences. Il poussait les élèves à manifester et à faire la grève, moyennant la petite somme de 5000 FCFA.

Pourquoi, selon vous ?

NK: En fait, lenjeu principal serait de ne pas payer les enseignants à partir du moment où il ny a pas de cours. Cela diminue la masse de salaires mensuels et le fondateur gagne davantage dargent.

Et comment lautorité a-t-elle réagi ?

NK : De ce que je sais, le fondateur fautif a été convoqué pour répondre de ses actes. Mais, je nen sais pas davantage.

Quelles sont les conséquences sur le fonctionnement de ladministration dans votre établissement ?

NK : Bien évidemment, les grèves bousculent fortement le programme annuel. Ça nous donne même un double boulot quant à la programmation des cours et des devoirs. Mais je pense quau-delà de nos établissements, cette situation touche fortement le ministère de lEducation nationale.

Quelle stratégie mettez-vous en place pour lutter contre cette forme de délinquance juvénile ?

NK: Tout ce quon peut faire, cest de sensibiliser. Car de plus en plus, les élèves constatent que ces perturbations ne les arrangent pas non plus. Ici à Dabou, Madame le Procureur participe également chaque lundi au salut aux couleurs avec les élèves pour leur rappeler limportance du civisme et de la discipline contre les conséquences fâcheuses de ces congés anticipés. Quant à la Direction régionale de lEducation nationale (DREN), elle essaie tant bien que mal de nous aider. Et lune des innovations qui marche très bien ici, cest la mise en place dune période de composition régionale dune semaine avant les congés, afin doccuper lesprit des élèves et leur enlever lenvie de manifester. Mais là encore, certains fondateurs détablissements font fuiter les sujets pour inciter les élèves à ne pas composer en quittant plus tôt lécole. Tout ça, pour ne pas payer leurs surveillants.
                                                                                                                                           La rédaction 1

BILLET: Mesures drastiques pour quiétude !

Congés anticipés. Disons plutôt désordre, indiscipline et violence revendiqués !  N'est-ce pas ce qui se passe dans les établissements scolaires à l'approche des congés ? L'école ivoirienne, socle de l'apprentissage, devient aujourd'hui le socle de l'aliénation. Les élèves sy adonnent à des manigances et à de la violence, juste pour quelques semaines, sinon quelques jours d'absence. Congés anticipés, ça s'appelle. Ecoeurant, désolant, surtout révoltant ! Des actes de violence et de rébellion insensés qui laissent des blessures dans nos cursus scolaires et universitaires. C'est à juste titre que, quand les coupables sont saisis par les forces de l'ordre ou démasqués par leur propre établissement, ils sont envoyés pour fréquenter les Commissariats ou la prison. Ces mesures drastiques, il en faut pour la quiétude des lycées et collèges en Côte d'Ivoire.
 Wilfried DION

ENQUETE EXPRESSE: Face au phénomène des congés anticipés. Les administrations entre impuissance et réaction

   Groupe Scolaire Thanon Namanko, sis aux Vallons, à Cocody, la commune la plus huppée de la ville dAbidjan. Lêkê (chaussures plastiques) aux pieds, le visage badigeonné de craie et de kaolin, des élèves habillés en pantalons de couleur kaki perturbent les cours. Ils manifestent le désir dobtenir des congés anticipés. Cest la récréation et la cour de lécole est bondée délèves. 
   Bamogo Patindé, professeur de Physique-Chimie, habillé en polo vert, pantalon noir, le visage barbu, assis sur un banc sous le préau, affirme dun ton convaincant : « Les élèves sont amis entre eux et sont de différents lycées et collèges. Ils sont régulièrement en contact et se donnent des informations de même que  des fakenews, afin danticiper leur départ en congés, via les réseaux sociaux ». Pour lui, les élèves à la base de ces manifestations sont « les moins studieux du système ». Jean Eby, professeur despagnol, vêtu dun costume de couleur gris-cendre, cravate rose, sourire aux lèvres, renchérit : « ces perturbateurs  viennent avec des cailloux, des bâtons et des armes blanches ». Il déplore « linconscience de ces jeunes violents ». 
   Yopougon, la plus grande commune de la capitale économique ivoirienne, un peu plus au Nord de Cocody. Le mode de propagation du phénomène des congés anticipés est tout autre. Au Lycée professionnel Mohammed 6, vêtu dun pantalon noir, dune chemise et dune ceinture blanche, létudiant en hôtellerie Moïse Koffi explique le processus suivi pour perturber les établissements. « Dans cette école, la Fesci se sert des élèves et des étudiants pour boycotter les cours », révèle-t-il, les larmes aux yeux. Censeur dans ledit Lycée, Madame Touato, une belle femme au teint clair, la taille moyenne, la quarantaine bien révolue, révèle que « ladministration est incapable de les sanctionner parce quils sont couverts par la FESCI ». 
   Contrairement aux différents établissements visités à Abidjan, le Collège moderne dApprompronou, dans lIndénié Djuablin, à 239 kilomètres dAbidjan, donne le bon exemple. Ici, les membres de ladministration ont pris des mesures drastiques contre ces perturbateurs. Jeune rouquin, barbu, coiffé à (?) ras, avec une calvitie au milieu de la tête, le professeur danglais Soro Doma explique : « Le collège ne reste pas sans voix face à cette situation. Lannée dernière, nous avons conduit deux de nos élèves perturbateurs de cours au commissariat dAbengourou ». 
   Pour maintenir et endiguer ce phénomène des congés anticipés, certains enseignants proposent que les chefs détablissements organisent des tournois sportifs, des interclasses, des concours et des journées culturelles à une semaine des congés afin de maintenir les élèves dans les salles de classe.

Dochiéré KONE
Eunice TOUATO
Elodie SORO
Oumou KARABOUALY

Interview

Bonneffort Douhou (ex-meneurs de grèves) :

« Nous ne préméditions pas 
les congés anticipés »



Ex-membre de la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte dIvoire (FESCI), Douhou Mondjibi Bonneffort a plusieurs fois mené des actions qui ont abouti à des congés anticipés. Il en explique, ici, la démarche et lobjectif.

Comment expliquez-vous que de simples grèves puissent aboutir à des congés anticipés ?

Nous ne préméditions pas les congés anticipés. Avant toute chose, nous organisons une réunion sous la présidence du Secrétaire général de la FESCI. Une fois la réunion terminée, nous déposons à ladministration une lettre contenant nos besoins. Le responsable de létablissement a jusquà 72 heures pour y répondre. Il ny a pas dinterruption des cours si nous obtenons gain de cause, dans le cas contraire, nous manifestons et lui imposons un ultimatum. Et si lultimatum nest toujours pas pris en compte, nous prenons le soin de renvoyer tous les élèves à la maison jusquà nouvel ordre.

Comment étiez-vous vous vu par vos professeurs ?

En tant quêtre humain, il est impossible de plaire à tout le monde. Si certains enseignants nous considéraient comme des perturbateurs de cours et des élèves inconscients, dautres voyaient en nous des héros, des leaders. Ils nous considéraient comme des élèves qui se battaient tout en risquant leur avenir pour que leurs droits soient respectés. Et ils nous en félicitaient.

Aujourdhui, cela vous pose-t-il problème dans votre vie professionnelle ? 

Absolument pas ! Quand je pense à tous mes amis qui ont raté leur vie à cause de ce phénomène, je me considère comme un gagnant. De plus, ça ma ouvert beaucoup de portes en termes de relation. Dans ma ville, je suis reconnu par les autorités comme un leader dopinions. Aujourdhui je suis un électricien en bâtiment qui gagne bien sa vie. Je nai sincèrement rien à envier à personne. Etre membre de la FESCI requiert de nombreuses capacités telles que lintelligence, la ruse et bien dautres. Nous avons mené des grèves pour de bonnes causes. Et à chaque opération, nous attendions le mot dordre du Secrétaire général, ce qui signifie que nous ne sommes pas des voyous et que nous travaillions pour nos amis. 

                                                                                                          Propos recueillis par Diane Amon

BILLET: Faut y mettre fin !


 C'est décevant : des élèves réclament des congés anticipés juste pour aller samuser avec leurs amis au lieu dapprofondir leurs connaissances. Ces inconscients sèment la pagaille dans les différents établissements et empêchent les autres de suivre correctement les cours. Ils passent par tous les moyens pour arriver à leurs fins, y compris ôter la vie à certains de leurs amis. Les proviseurs et directeurs impuissants, les autorités ministérielles doivent prendre des mesures fermes pour éradiquer cette plaie de notre société. 
                                                                                                Elodie SORO

Billet: Quelle inconscience !

Lécole ivoirienne va mal. Elle va même très mal. Les élèves, ces jeunes gens censés être lespoir de ce pays, sont ceux-là même qui militent pour la fermeture sa fermeture, à tout moment. Pourquoi ? Nous nen savons presque rien ou du moins, nous avons peur den parler. Violence incontrôlables à quelques jours des congés. Fermeture prématurée des salles de classe. Cours interrompus. Joie des initiateurs et perturbateurs. Quelle inconscience !!!                                   
                                                                                                                                            Fatou Sidibé

INTERVIEW


Djo Bi Franck (emprisonné pour Congés anticipés) : 

« Je suis toujours indexé 
comme un mauvais enfant»

Djo Bi Irié Franck est élève en classe de Terminale A au Collège Chateaubriand de Dabou. En décembre 2017, participant à des manifestations orchestrées avec ces camarades pour perturber les cours et partir plus tôt en congés de Noël et du Nouvel an, Djo Bi Irié a été emprisonné. Après une dizaine de jours en prison pour destruction de biens et troubles à lordre public, il a été reconnu non-coupable dans un procès atypique. Il a accepté de nous parler des événements qui ont conduit à son arrestation.

Monsieur Djo Bi Irié Franck, chaque année, début décembre, les élèves entreprennent des mouvements de foule pour aller plus tôt en congés de Noël et du Nouvel an. Qui en sont, selon vous, les véritables acteurs de ce fléau ?

Djo Bi Franck : Ce sont principalement les élèves des Ecoles publiques qui sont la base du mouvement. Et par la suite ceux du privé sen mêlent.
Comment sont-ils organisés ?
Ces groupes sont formés et constitués de leaders des précédentes manifestations. 

Quelles ont été vos motivations ?

DBF: Leffet de groupe et lenvie dêtre au centre de laction. 

Comment procédiez-vous ?
DBF: Avant le jour de la manifestation, une réunion se tient avec les leaders de chaque école. Lors de cette réunion, on établit les stratégies, lheure, et le mode opératoire, ainsi que le mot dordre. Le jour-j, et à lheure prévue, chaque leader et son groupe commencent à manifester par des coups de sifflet. Si ladministration et les élèves ne cèdent pas, le leader appelle ou envoie des SMS à dautres leaders qui le rejoignent afin datteindre lobjectif fixé.

Vous avez été arrêté et emprisonné
DBF: Oui, j'ai été enfermé pendant neuf (9) jours dont un jour en boîte et huit autres à la grande prison de Dabou, en décembre 2017. Les congés étaient prévus pour le 21 décembre, et nous avons décidé dy aller plus tôt, soit le 11.  Le 21, cétait trop loin pour nous, car on voulait plus de temps pour les congés. Ce jour-là, cétait la violence dans toutes les écoles de la ville, publiques comme privées. On délogeait les élèves de gré ou de force, malgré la police à nos trousses. Lambiance était très tendue. Il y a eu des destructions de biens publics et des blessés.

Vous avez été jugé et acquitté. Quelle était lambiance lors du procès et après votre libération ?
DBF: D'abord, je suis arrivé à la grande prison un jour après mon arrestation. La juge vient me trouver et m'informe que mon procès aura lieu le jeudi. Au jour fixé, le garde pénitencier fait l'appel des détenus et je nentends pas mon nom. C'était comme si le ciel me tombait dessus. Langoisse et le stress sinstallèrent, et je pris conscience de mon acte et de ma situation. Pendant ce temps, mes amis et élèves de la ville plaidaient auprès du procureur pour ma libération. Une semaine après, mon nom figurait sur liste des détenus à juger.     
    Le jour du procès, les policiers mont escorté jusquà la salle daudience. Pendant que j'attendais mon tour à la barre, j'entendis des cris de manifestation, des coups de cailloux sur le toit de la salle d'audience, des coups de sifflet. C'est à ce moment que le procureur m'appelle à la barre des accusés et proclame mon verdict qui stipule que j'étais libre. Ouf ! Mon soulagement fut total. A ma sortie de la salle d'audience, je fus accueilli par les élèves comme un héros...

Vous considérez-vous vraiment comme un héros ? DBF: (Il soupire et baisse la tête). Je suis toujours indexé comme un mauvais enfant ayant un impact négatif sur les jeunes.
Quelles ont été les conséquences sur votre vie scolaire et sociale ?
   Je suis stigmatisé et ce nest pas facile de vivre ainsi au       sein dune société. Outre cela, jai un casier judiciaire qui est taché par cet acte et cela me suivra toute ma vie, où que jaille, quoi que je fasse.

Etes-vous prêt à recommencer ?
DBF : Non, plus jamais de la vie ! Jai pris conscience que ce sont des mouvements et réactions de foule. Une grave erreur ! La prison ma ouvert les yeux et lorsque j'ai vu ma maman couler des larmes à mon procès, j'ai juré de ne plus la mettre dans une telle situation. Je regrette mon acte et davoir sali limage de ma famille et agi comme si ma mère ne mavait pas donné déducation. Je navais pas pensé aux sacrifices quelle faisait pour moi, et à la peine quelle pouvait ressentir en voyant son fils que je suis, là où jétais.

Quels messages pouvez-vous donner aux élèves qui continuent dagir comme vous à lépoque ? 
 DBF : Le seul conseil que je peux donner aux élèves, aux générations actuelles et à venir, c'est de ne jamais céder à l'effet de groupe. Chacun est responsable de son destin et de ses actes. Si tu commets une faute, tu seras le seul à faire face à la justice. Les élèves doivent se servir de mon cas pour ne pas reproduire les mêmes erreurs. Ils doivent penser aux sacrifices de leurs parents.
Interview réalisée par 
La rédaction 1

BILLET: Sortez, y a pas cours !

   Ils sont logés en début d'année, mais demandent à être délogés quand cela leur sied. Les élèves transforment nos établissements en champs de bataille à l'approche des congés scolaires. Cette période reste l'un des moments favoris pour eux. Ils n'attendent que la suspension des cours et ne mesurent pas la gravité des dégâts physiques, moraux et matériels que ce vacarme pourrait engendrer. Tout ce qu'ils souhaitent entendre : « Il n'y a pas cours, rentrez chez vous ! ». Comment terminer le programme scolaire ? Comment valider l'année ? Comment réussir à leurs examens de fin d'année ? Ils sen fichent. Leur souci majeur ? « Anticiper les congés ! ». Quelle inconscience ! A croire qu'ils ne savent pas pourquoi ils sont élèves. Or, ils restent de pauvres apprenants, qui ont besoin d'apprendre.
                                                Kadhy Sanogo

EDITORIAL: Cest la faute à tous !

«Qui suit les traces de son père apprend à marcher comme lui». Ladage est foulé au pied dans lEcole ivoirienne. Ici, de nombreux élèves ne marchent pas du tout sur les traces de leurs pères. Et les résultats sont bien visibles. 
   Jadis, lécole ivoirienne était enviée de tous. Rigoureuse,  elle a formé une élite dhommes et de femmes conscientes, sages et respectueuses des valeurs de soumission à lautorité, de déférence à légard du maître, de discipline et damour pour le travail bien fait. Avec ces cadres, le pays a arboré une fière allure et entamé un essor fulgurant dans le concert des nations. Ces périodes fastes du système éducatif ivoirien, avec les noms de ses brillants élèves qui y ont émergé, sont désormais un lointain souvenir, enfermées dans les livres fermés des élèves daujourdhui. De plus en plus, la médiocrité sinstalle. Le seuil des moyennes pour passer en classe supérieure est passé de 12 à 10 sur 20, voire moins. Les sujets des examens de fin dannée sont de plus en basiques pour octroyer les diplômes au plus grand nombre. Dorénavant, dans notre société, le diplôme semble primer sur la compétence. Mais à quoi sert un diplôme décerné à tout venant, qui nest pas la mesure des connaissances réelles du récipiendaire ? 
   Evidemment, les élèves, encouragés dans cette guerre contre leur propre succès, orchestrent des manifestations pour perturber les cours en vue de congés anticipés. Dans cette situation, les responsabilités sont partagées : la famille, cellule embryonnaire de la société, na plus un regard particulier sur le rendement scolaire des enfants et leur comportement en dehors du cadre familial ; lEcole fait preuve de laxisme, en rabaissant le niveau de lévaluation, symbole de la rigueur du système éducatif ; les médias ne présentent, généralement, que les modèles amoraux et incultes à la jeunesse qui les copie. Or, feu Nelson Mandela lenseigne : « Léducation est larme la plus puissante pour changer le monde ». Vivement donc, le retour aux bonnes habitudes pour sauver la jeunesse ivoirienne. 
                                                                                                                                        Drabo Alassane

mercredi 20 mai 2020

Congés anticipés en Côte d'Ivoire La plaie du système ivoirien

En Côte d’Ivoire, le secteur éducatif est confronté à d’énormes difficultés, notamment le phénomène des congés anticipés qui constitue une véritable plaie pour l’éducation nationale. Chaque année, à l’approche des congés de Pâques et de la Noël, les élèves manifestent  le désir de quitter les bancs, avant la date fixée par le ministère de l’éducation. Certains d’entre eux usent de violence pour se faire entendre aussi bien à Abidjan qu’à Abengourou.
Nous sommes au Groupe Scolaire Thanon Namanko, sis aux Vallons, à Cocody, la commune la plus huppée de la ville d’Abidjan. Chaussés en Lêkê (Chaussures plastiques), le visage badigeonné de craie et de kaolin, des élèves habillés en pantalons de couleur kaki perturbent  les cours. Ils manifestent le désir d’obtenir des congés anticipés. 
Dans cette cour bondée d’élèves, une ambiance de récréation était au rendez-vous. Monsieur Bamogo Patindé, professeur de Physique-Chimie, habillé en polo vert , pantalon noir, le visage barbu et assis sur un banc du préau, affirme d’un ton convaincant : « Les élèves sont amis entre eux et sont de différents lycées et collèges. Ils sont régulièrement en contact et se donnent des informations de même que  des fake news, afin d’anticiper leur départ en congés, via les réseaux sociaux ». Pour lui, les élèves à la base de ces manifestations sont « les moins studieux du système ».
Quant à monsieur Jean Eby, professeur d’espagnol, vêtu d’un costume de couleur grise cendre, d’une cravate rose,  le tout sublimé d’un large sourire esquissé, « ces perturbateurs  viennent avec des cailloux, des bâtons et des armes blanches ». Il a aussi déploré « l’inconscience de ces jeunes violents ». 
Un peu plus loin, à Yopougon, la plus grande commune de la capitale économique ivoirienne, le mode de propagation est tout autre chose au Lycée professionnel Mohammed 6. Vêtu d’un pantalon noir, d’une chemise et d’une ceinture blanche, l’étudiant en hôtellerie Moïse Koffi montre le canal met à nu le processus suivi pour atteindre leur établissement. « Dans cette école, la FESCI se sert des élèves et des étudiants pour boycotter les cours », révèle-t-il, les larmes aux yeux.
Censeur dans ledit Lycée, Madame Touato, une belle femme au teint clair, la taille moyenne, la quarantaine bien révolue, révèle que « l’administration est incapable de les sanctionner parce qu’ils sont couvert par la Fesci ». 
Contrairement aux différents établissements visités, la réalité est tout autre au collège moderne d’Apprompronou, dans l’Indénié Djuablin, à 239 kilomètres d’Abidjan. Dans cette école, les membres de l’administration prennent des mesures plus drastiques contre ces perturbateurs. Jeune rouquin, barbu, coiffé à ras, avec une calvitie au milieu de la tête, le professeur d’anglais Soro Doma estime que l’administration de l’école s’active pour éviter les congés anticipés. «  Le collège ne reste pas sans voix face à cette situation. L’année dernière, nous avons conduit deux de nos élèves perturbateurs de cours  au commissariat d’Abengourou », a-t-il clarifié. 
Pour maintenir et endiguer ce phénomène des congés anticipés, certains enseignants proposent que les chefs d’établissements organisent des tournois sportifs, des interclasses, des concours et des journées culturelles à une semaine des congés afin de maintenir les élèves dans les salles de classe. 
                                                                                                                                       Dochiéré KONE
                                                                                                                                       Eunice TOUATO
                                                                                                                                             Elodie SORO
                                                                                                                           Oumou KARABOUALY

mardi 19 mai 2020

Tribune libre: point de vue sociologique

Le Phénomène des congés anticipés en Cote d’Ivoire est un mal qui perdure et qui afflige la société en général. Partant de là, nous avons sollicité le regard sociologique de Dr ANDJOU, sociologue de formation et enseignante de cette discipline.

LE PHÉNOMÈNE DES CONGÉS ANTICIPÉS DANS LES LYCÉES ET LES COLLÈGES

Origine du phénomène
‘’Les congés anticipés’’ est un phénomène social qui s’inscrit dans les violences scolaires. Ce n'est aussi pas un phénomène nouveau. Les historiens, les sociologues, les philosophes,….ont largement traité de cette violence. Durkheim reconnaît que l'enseignant doit faire preuve d'autorité en ayant parfois recours à la violence, violence considérée comme pratique normale et élément constitutif de l'enseignement. Dès l'antiquité, on retrouve l'idée de l'enfant turbulent, incontrôlable qu'il convient de « dresser » afin de se faire entendre. De telles pratiques ont longtemps perduré et apparaissaient comme un véritable rite de socialisation et d'attente de la vie adulte. (Jean-Louis LORRAIN, 2004)
Ce type de violence intégrative a eu pour conséquence une lente mutation des représentations de l'enfance qui a abouti à une dévalorisation de la violence des éducateurs conduisant à la révolte des élèves.
Dès lors, le phénomène des congés anticipé connaît une expansion dans les lycées et collèges en Côte d’Ivoire. Il devient pour les élèves, une manière d'asseoir et d’imposer leurs idéologies (l’arrêt des notes égal aux congés). Cette violence-là, Bourdieu et Passeron la qualifient de "violence symbolique" car, elle permet par le biais de l'habitus « de parvenir à imposer des significations et à les imposer comme légitimes en dissimulant les rapports de force ».
Précisons que les lycéens et les collégiens sont en général des adolescents.L'aspect sociologique du phénomène des congés anticipés met l'aspect comportemental en avant. L'adolescence se caractérise ici dans l'affiliation ou l'assimilation à un groupe, à une bande pour combler le besoin d'identification et pour permettre de s'affirmer. Ces groupes ne peuvent être que des lieux de débordement et d'agressivité et où les confrontations diverses sont mises en œuvre pour tester la solidité des valeurs traditionnelles et à prendre plaisir dans la transgression de l'interdit. C'est la période de l'imprévisibilité aussi bien dans le comportement que dans la décision avec un refus de tout ordre établi, de revendication de liberté et d'indépendance: la période des conflits de génération. L'adolescent n'a plus la même vision que l'adulte et exige des solutions immédiates à des problèmes qu'il pose. Il est hypersensible et n'arrive pas à domestiquer ses désirs. Un rien suffirait à déclencher le conflit. Ainsi, le phénomène des congés anticipés est plus observé une semaine avant la date prévue pour les congés de Noël et de fin d’année, juste à l’arrêt des notes et au calcul des moyennes du premier trimestre. Une fois les notes arrêtées et les moyennes calculées, il n’y a pratiquement plus de devoirs notés, ni d’interrogations écritesjusqu’au retour des congés.
Date de départ
Les congés anticipés en Côte d'Ivoire sont devenus médiatiques depuis 1990 et n’a pas cessé de prospérer.
Les congés anticipés semblent s'inscrire tout particulièrement au cœur de l'ère démocratique du pays.Et on assiste à une recrudescence des actes de violence de la part des élèves et étudiants pour les revendications de toutes sortes devant particulièrement celles du départ pour les congés.
Ces faits de violence en milieu scolaire répétitifs et multiples se manifestent aussi bien au sein des établissements que dans les rues. La revendication des congés anticipés est marquée par des actes déviants comme la traversée du guerrier, les ‘’exploits de Zéna la guerrière’’….et le délogement des élèves des établissements par les membres ….lors de leurs revendications.

Lieu de naissance et mode propagation
- Mars 1990 manifestations de lycéens à Adzopé avec la mort de l'élève KPEA Dominé.
- Avril 1990: déferlement d'élèves du primaire et des lycées dans les rues d'Abidjan occasionnant des dommages à la SOTRA (191 bus endommagés et 240 millions de préjudices (selon la direction générale de la compagnie).
- Février 1992 : descente d'élèves dans les rues de Man suivie de vandalisme, pillage, destruction d'habitat, violences et voies de fait sur les agents de la sécurité.
- Mars 1992 : vandalisme et casses d'élèves à la direction du lycée moderne de Boundiali.
- Décembre 2000 : coups et blessures sur la personne d'un professeur à Tiassalé.
- Dans le courant des années 2000, des groupes d’élèves se réclamant de la Fesci (Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire), parfois violents, déferlaient sur des établissements publics et privés pour forcer l’administration et le corps enseignant à arrêter les cours avant la date indiquée pour les congés de Noël
Tous ces évènements montrent comment le milieu scolaire a été pris dans un cycle de violence que les autorités scolaires n'avaient pas prévu.
Mode opératoire
Une enquête sociologique a fait ressortir en outre, que des élèves sous l'emprise de certains psychotropes (des comprimés à caractère excitatif et de la drogue vendus par les commerçantes ambulantes) et de la boisson (maquis et bars aux abords des établissements scolaires), posent des actes de violence envers le personnel scolaire pour imposer leur diktat. 
1) Impact de phénomène sur la société ivoirienne
L’école est une institution sociale qui est régie par des lois. Elle a donc ses exigences, auxquelles tout citoyen désireux d’acquérir du savoir, devrait se conformer. Le respect de l’autorité n’est plus de mise à l’école : des élèves qui violent des enseignants. En Côte d’Ivoire, l’école n’est plus forcément le lieu de production des compétences et de promotion du mérite.
Ce phénomène remet en cause l’école en tant qu’une institution éducative puisque les élèves sont les purs produits de l’école.
2) Ce phénomène est classé dans une catégorie sociologique parce qu’il est un fait social.
3) Si aucune mesure n’est prise pour lutter contre ce phénomène dans un futur proche, l’échec scolaire marqué par le décrochage (sortir du  système sans diplôme)  et abandon. Dans un futur lointain, l’école devrait un lieu d’apprentissage des comportements déviants, perte de valeurs sociales.
4) Je ne parlerai pas de méthodes mais des pratiques éducatives pour lutter effacement contre ce phénomène : 
- Sensibilisation sur les conséquences de ce phénomène
- L’arrêt et le calcul des notes ne doivent pas précéder les congés
- Enchainement avec le trimestre suivant
5) Bien qu’on enregistre des morts dans la revendication des congés anticipés (un élève de troisième tué le 4 décembre 2019 à Anyama, à Daloa, un élève de Terminale tué le lundi 7 décembre 2019 et un élève de seconde d’un lycée de Dimbokro, tué également quelques jours après ), le phénomène des congés anticipés ne s’apparente à celui des enfants en conflit avec la loi. Car ces enfants tuent, volent et agressent la population à l’arme blancheLe non-respect de l’autorité explique aussi la persistance de ce phénomène de congés anticipés. Car, si les élèves avaient de la considération pour leur tutelle, ils se conformeraient au calendrier des congés scolaires.
  
                                                                                                                                                 Dr ANDJOU
                                                                                                                                                   Sociologue

Tribune libre: point de vue juridique

Le Phénomène des congés anticipés revêt en dehors des conséquences administratives ou scolaires, d’autres conséquences juridiques. Nicole ASSOUGBA, juriste de formation s’est prononcé sur le fléau. 
1- Les chefs d’Etablissements ont-ils la possibilité d’engager des procédures judiciaires contre lesdits élèves et étudiants ?
     2-Quelle appellation juridique donne-t-on à ce phénomène ou aux enfants qui s’y adonnent ?
    3-Ces élèves et étudiants impliqués dans ce phénomène sont-ils traités comme des enfants en conflit avec la loi ?
   4-Que prévoient les lois ivoiriennes pour les acteurs de ce phénomènes ?

Les chefs d'établissement ont la possibilité d'engager des poursuites judiciaires à l'encontre des élèves ou étudiants qui perturbent le bon déroulement des cours en vue d'avoir des congés anticipés.
Cette possibilité se situe à 2 niveaux :

Au niveau de sa responsabilité en tant qu'encadreur qui donne l'éducation, la connaissance à un élève ou à un étudiant dans le cadre du système éducatif .
 Au niveau de sa responsabilité en tant que responsable d'une structure puisque garant de la sécurité de ces élèves, personnels et administratifs au sein de son établissement.

 Ce phénomène étant relativement récent et surtout en Côte d’Ivoire , la politique a jugé bon de lui donner le nom de perturbateur de cours.
Ce qui nous permettrait de tous l'appeler ainsi. 
Le perturbateur de cours est tout simplement un individu qui perturbe le bon déroulement des cours, ceci inclut un état psychologique de ce dernier.
Il a donc un comportement inadapté pour un élève ou un étudiant de son âge.
Ex: Il veut tout avoir et sur le champ, il contrôle peu ses frustrations et ses émotions, il a de faible capacité à se projeter, la méconnaissance des règles sociales et éducatives.

Un enfant en conflit avec la loi est en générale un mineur puisque, qui dit enfant se réfère presqu'immédiatement à la convention de l'UNICEF pour les droits des enfants.
Cette convention en son article premier stipule que dans toutes les décisions qui concernent les enfants qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protections sociales des tribunaux, autorités, administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale.
On comprend alors que tout est fait pour protéger l'enfant, aussi en son article 5, on prend en compte la responsabilité des parents ou le cas échéant des membres de sa famille ou de la communauté.
Par contre, un élève ou un étudiant qui perturbe les cours utilise des moyens propres et prémédités.
Qui parle de préméditation parle de réflexion.
Peu importe le niveau de ce dernier
Aussi, selon la loi ivoirienne l'âge de  la responsabilité pénale est de 16 ans et celle de la responsabilité civile est de 18 ans.
Au final, la différenciation sera faite qu'il s'agisse d'un enfant de 16 ans ou plus ou d'un adulte.

 Pour la loi ivoirienne, ce sont des sanctions prévues dans le code civil relatif à la responsabilité civile

Article 13,82 du code civil
*Tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer*

On a aussi l'article 13,84

*On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre ou des choses que l'on a sous sa garde*

Fait référence à la convention de l'UNICEF.

Quand on parle de communauté même le chef d'établissement peut être dans la communauté.

Les sanctions pénales qui sont prévues par la loi ivoirienne

Le code pénal dit *en cas de coups et blessures, l'infraction est considérée comme un délit et un délit est sanctionné par une privation de peine c'est à dire par une peine privative de liberté ce qui veut dire qu'il peut aller en prison et en plus de cela paie une amende*


Cela dépend de la gravité de l'action.
Un adulte ou un étudiant n'a pas le même âge qu'un enfant qui est à l'école primaire qui perturbe les cours.
Aussi, un enfant qui est au primaire n'a pas le même âge que celui qui est au collège ou au lycée.

Cela dépendra donc du juge car c'est lui qui va déterminer s'il fera 10 ans parce qu'il y'a toujours des fourchettes dans la loi on peut dire 1 à 3 ans.

 
                                                                                                                                 Nicole ASSOUGBA
                                                                                                                                  Juriste de formation

Chronique Le désordre à l’école, à qui la faute ?

Dans cette société en pleine mutation, si l’Afrique peine encore à prendre son envol dans le concert des grandes nations, c’est parce que nos dirigeants n’ont pas encore compris que la formation efficiente de la jeunesse est la pierre angulaire de tout progrès.  Chez nous, en Côte d’Ivoire, la norme, ce sont les congés anticipés dans le système éducatif. Cette réalité n’émeut personne. D’ailleurs, nos autorités semblent s’y plaire. L’année dernière, nous avons assisté, comme des spectateurs attristés par le casting d’un film d’horreur, à ces congés anticipés orchestrés par certains élèves en manque de repères.   A la fin de l’année académique, la direction des examens et concours a brandi, comme un trophée de guerre, le résultat. Il est sans appel : Plus 6.500 cas de fraude et de tricherie lors des examens à grands tirages. 
A qui la faute? A cette question tonitruante, il est difficile d’apporter une réponse concluante. Quoi qu’il en soit, nous avons laissé notre système éducatif entre les mains d’une mafia appelée cyniquement Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire.  Elle a la possibilité de gérer le calendrier scolaire selon les humeurs de ces « leaders ».  
A qui la faute ?  Aucune idée. Quoi qu’il en soit, nous avons à la tête de nos institutions éducatives des personnes qui ne sont pas des modèles. La faute n’incombe sûrement pas à ces personnes qui ont leurs enfants dans les  meilleures universités du monde, et qui gèrent notre éducation nationale. 
A qui la faute ? Ce n’est pas la faute aux parents non plus ! Certains d’entre eux ne savent pas qu’un enfant, on l’éduque, on le nourrit, on lui donne des valeurs sociales, pour ne pas qu’il soit une entrave à la vie communautaire. Ne leur demandez pas de faire ce qu’ils ne savent pas !
                                  
                                                                                                                                  Christian KOSSONOU

EDITO: Tout le monde, dehors !

En Côte d’Ivoire, l’école n’a pas seulement la vertu de former des intellectuels en devenir, elle forme, brillamment d’ailleurs, les as du délogement. L’on savait déjà la vie éducative de notre pays vilainement submergée de phénomènes exposant l’inconscience d’une jeunesse maîtresse d’un destin, le sien, dont les premiers dessins sont pourtant affolants. L’une des  dernières innovations de ces jeunes aux décisions calamiteuses, dans le quotidien éducatif du pays est l’anticipation des congés, notamment en période festive. Les piteux résultats scolaires que font parader sous nos yeux les examens qui occasionnent eux-mêmes, les plus ingénieuses intrigues, sont plus terrorisants qu’ils paraissent. Collèges, lycées, universités, aucun temple de l’enseignement n’échappe aux actes incongrus et sinistrement dévastateurs des pourfendeurs du savoir-être, des belligérants de la bonne éducation, des objecteurs de l’apprentissage, des missionnaires du vandalisme. Depuis 2000, l’abcès de déception que fait couler ce fléau demeure salissant. Le déphasage jugé abyssal  entre le quantum horaire fixé et le déviationnisme pratiqué par les chefs d’établissement est une rengaine devenue rébarbative et inconséquente. Les instruments scolaires sont  triviaux devant l’élégance des gourdins et armes blanches. Les mots d’ordre des décideurs syndicalistes sont les premières entremises de l’expansion de cet absurde fléau mais pas les uniques. En effet, des bambins, des caïds en kaki, ont fait de leur maigre influence, le guichet de décisions éducatives putrides. Ainsi, littéralement harassés par un emploi du temps normal, Ils bastonnent en premier, le calendrier scolaire. Médusés et indignés, nous rejetons  violemment ce méprisable message: « Fermez les salles de classes et bondez les rues » !
                                                                                                                       Jean-Cyrille OUATTARA

PORTRAIT

Kouamé Koffi Célestin alias « l'invincible » où encore « Tiaco » surnom que lui ont valu ses prouesses, est un ex membres de la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d’Ivoire, communément appelé FESCI. Il fait ses premiers pas au sein de cette Fédération, en 2006, en tant qu'élève en classe de seconde scientifique, au Lycée Municipal de Yopougon actuel Pierre Gadié.
Il effectue alors plusieurs délogements d’établissement en tant que membre actif au sein de ladite Fédération. 
De son établissement, au Collège Moderne du Plateau. En passant par le Collège Pigeon ou encore le Collège Ponty. Il fait parler de lui comme l'un des investigateurs des congés anticipés dans la ville d'Abidjan, avec en moyenne deux ou trois délogements d’établissements par semaine.
En effet, avec la violence des assauts de sa bande, il cause de nombreux dégâts matériels et fait plusieurs blessés. Mais toutes ses actions étaient sous l'effet de l'euphorie et de la tendance de l’époque, comme il le souligne dans ses propos.
Sa plus grande fierté en tant que membre actif de la FESCI, a été le délogement du Collège Moderne de Yopougon devenu aujourd’hui le Lycée Moderne Yopougon Andokoi, où il a été le coordonnateur de la mobilisation.
Aujourd’hui, il est employé dans une structure de la place, en tant que pompiste. Toujours est-il qu’il garde de bons souvenirs de la Fédération où « l'intelligence participait à lutte. »
 
                                                                                                                                              EuniceTouato

ENCADRE: Les Congés anticipés en Cote d'Ivoire: un phénomène qui perdure

Au début, il y a environ dix ans, les perturbations débutaient à deux ou trois jours des différents congés ou vacances scolaires. On a alors laissé faire. Ensuite c'est devenu dix jours avant. On a encore laissé faire. Aujourd’hui, les perturbations débutent à un mois des congés de Pâques. Ce qui revient à dire que le phénomène s’étend impunément dans toutes les villes et régions de la Côte d’Ivoire. Est-ce la faute des élèves ? Oui en premier lieu. Mais et après ?.
Ce serait mieux d'identifier les acteurs avec l'appui du Ministère de l’éducation Nationale de l’enseignement Techniques et de la formation professionnelle. De les punir afin qu'ils servent d'exemple aux yeux de tous. Ainsi à l'avenir, avant toutes perturbations ils y réfléchiront à plusieurs reprises.
                                                                                                                                       
                                                                                                                                          Eunice Touato

ENCADRE: A chaque problème une solution

 Le phénomène des congés anticipés prend de l’ampleur au fil du temps. C’est le fort constat aujourd’hui. Dès l’instant que les congés approchent, le phénomène saute aux yeux. 
Contagieux est-il car à peine un établissement se mobilise et d’autres s’en suivent. La manière si rapide dont se propage le phénomène est certainement due au fait que tous les acteurs du phénomène dans les établissements scolaires sont aux aguets quant à un potentiel établissement qui va dicter le ton, en signe d’alarme. 
 L’alerte est souvent parvenue aux autres établissements par voie téléphonique. Une méthode qui fonctionne bien jusque-là mais qui n’est pas infaillible. A cet effet, pourquoi ne pas interdire temporairement l’apport du téléphone cellulaire aux élèves justement à l’approche des congés dans les établissements scolaires ?    
                                                                                                                                       WILFRIED  DION

Enquête: Ecole ivoirienne: Les missionnaires du délogement

Parmi  les épées qui affolent, d’année en année, l’éducation ivoirienne, le phénomène des congés anticipés en est inéluctablement, l’une des plus tranchantes. Plus couramment,  dans le vif du mois de Décembre ainsi qu’à l’approche des congés de Février,  voire de pâques, les regards, les esprits, les programmes et mêmes les plus grandes ruses des élèves convergent rondement vers les congés. Ce perpétuel phénomène qui flétrit le système éducatif ivoirien a connu, à Abidjan comme à l’intérieur du pays, notamment à Duékoué et Odienné, des incalculables épisodes, des plus confus aux plus obscurs, avec un mode opératoire touffu : Enquête. 
Université Félix Houphouët-Boigny, il est 13H quant débutent nos échanges avec N’seth Odilon, deuxième secrétaire adjoint à la communication de la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI).
Pour rappel, en décembre 2019, la Fédération Estudiantine et Scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI), avait lancé une campagne de sensibilisation sur la vilenie de ce phénomène. Cette campagne s’est pourtant avérée pour le moins improductive, étant donné la récidivité des élèves.
D’emblée, notre interlocuteur n’hésite pas à dédouaner ses pairs : « Il y a une différence entre une grève et un délogement. Ce sont nos bases qui lancent des mots d’ordre de grève et quand sur le terrain, on nous barre la route, on utilise la force », clarifie-t-il, furieux. Le colosse barbu à la chevelure brune a pareillement expliqué qu’au lancement de la grève, la FESCI le fait savoir à l’opinion publique et que sur le terrain, elle se sert effectivement des pierres et gourdins qu’elle trouve pour concrétiser ses intentions.
Ce phénomène désagrège, les écoles qui jalonnent les communes phares du district d’Abidjan dont Adjamé et Abobo qui sont les plus molestées par le volet barbare de celui-ci. 
Dans le sillage de ce tandem communal, Tirangué KABA, Directrice du Groupe Scolaire Jacob Williams de la circonscription Adjamé-Attécoubé et présidente de l’amicale des directeurs d’écoles de ladite circonscription est la première à « cracher le morceau ». Sur un ton extrêmement posé, la directrice, drôlement élégante,  derrière ses verres pharmaceutiques s’exprime: « C’est généralement, le matin, entre 09H et 11h que les élèves convergent vers notre école. Ils sont plus d’une vingtaine et sont majoritairement armés de gourdins, pierres et d’armes blanches. Ce sont pratiquement tous des élèves qui s’entassent devant l’école pour semer la zizanie », a-t-elle dévoilé. Toutefois, son regret  s’est étendu à un épisode sombre qui a médusé les âmes sensibles. En effet, il y a quelques années, ce coup de force périodique a fait couler le sang d’un policier, grièvement blessé, aux alentours du Groupe Scolaire CEMA, théâtre de cet affrontement sanglant.
Aux 220 logements, plus exactement à l’école  « La Croix-Rouge Cité de l’enfance », la tranquillité est frappante. Cette école historiquement emblématique, compte tenu de l’institution internationale dont elle est sous la coupole, échappe coutumièrement à ce déguerpissement. Néanmoins, sa situation géographique la met malencontreusement au centre des actions. La confirmation, nous l’avons aux lèvres de Mr Silué, directeur du primaire au sein de ladite école qui ajuste ces mots : « Des écoles environnantes dont Satigui Sangaré sont maintes fois, prises d’assaut par les mêmes types d’élèves, approximativement une trentaine, tôt le matin, avec les armes similaires à celles qui s’utilisent partout, dans de telles circonstances », dénonce-t-il, très mécontent. Il fustige, par ailleurs, certaines administrations scolaires, qui, sans résistance, cèdent aux velléités de ces élèves par moment accompagnés de la FESCI. 
Dans la commune abobolaise, un autre fief des « délogeurs », un élève de quatrième avait succombé à ses blessures l’an dernier, à la suite d’une opération scolaire musclée, qui a tourné au drame.
Mathieu Tshéssekou, professeur de Philosophie au Lycée Municipal d’Abobo, nous révèle que ce sont quasiment cinquante élèves, sans aucun étudiant, qui chamboulent, fréquemment, leur programme scolaire. Les mêmes armes sont au rendez-vous et les heures se côtoient : 1Oh-11h. Si ses informations sont plutôt lapidaires, ses sources elles, sont par contre extraordinaires. Sur place il nous met en liaison téléphonique avec Adama TRAORE, l’un de ses collègues enseignant au Groupe Scolaire Gbapleu, dans la sous-préfecture de Duékoué. Cette ville martyrisée par la crise postélectorale de 2010-2011 a semblablement connu les affres de ce fléau scolaire, en Novembre 2011, relativement à  l’attaque du Lycée Moderne de la ville qui a emporté un élève.  
Le jeune instituteur nous témoigne que le dernier coup de force scolaire dans la ville avait  pour arène le collège privé Alphonse DOUATI de Duékoué. Selon lui, ce sont environ trente élèves, tous fescistes, en tenue scolaire, munis d’armes blanches, qui ont fait triompher la violence autour de 10H. Il allonge ses informations et les détaillent davantage : « L’administration de l’établissement a tant bien que mal tenté de s’y opposer mais la fougue de ces derniers a eu le dernier mot ».  
Le 11 Décembre 2019, le Général Vagondo DIOMANDE,  actuel ministre de la sécurité et la protection civile avait classé Odiénné parmi les villes les moins touchées par ce phénomène, à l’occasion d’un point presse au Centre National des matériels Scientifiques(CNMS) à Cocody.
Confiné aux cotés des Odiennékas, Wilfried DION, l’un des membres de notre rédaction, enquête successivement au Lycée Moderne1 et au Groupe Scolaire Mamadou Coulibaly1 de la ville. Il y découvre qu’en 2015, tout comme en Décembre 2018, chacune de ces écoles a subi la pire animosité des missionnaires du délogement, dans des conditions encore plus ahurissantes que celles des écoles que nous avons sillonnées à Abidjan. Ces méthodes agressives, perpétuellement employées lors des délogements, ont poussé les chefs d’établissements respectifs à joindre les forces de l’ordre qui ont dû, quant à elles, ragaillardir leurs efforts, face aux hostilités lancés par la ruche d’élèves.
Cette bavure scolaire est durement réprimandée par le gouvernement, dans la mesure où cinquante-six élèves auteurs de délogement, avaient, au total, été déférés à la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan(MACA), en décembre dernier.

                             Jean-Cyrille OUATTARA 
                                 Christian KOSSONOU
                                              Wilfried DION
                                          Philippe AKOUA

IL FAUT Y METTRE FIN !

 C’est décevant de voir des élèves réclamer des congés anticipé juste pour aller s’amuser avec leurs amis que d’approfondir leurs connaissances.
Ces élèves inconscients décident de semer la pagaille au sein des différents établissements et ainsi empêcher les autres de suivre correctement les cours, ils passent par tous les moyens pour arriver à leurs sales besognes et vont jusqu’à ôter la vie de certains de leurs amis.
 Les proviseurs et directeurs sont impuissants face à cette situation et ils ne peuvent pas retenir les élèves dans ces cas de peur d’être tenu pour responsable de ce qui leur arrivera.
Que les autorités ivoiriennes prennent des mesures afin d’éradiquer cette plaie de notre société. 
                                                                                                                     
                                                                                                                                            SORO ELODIE 

Billet Notre école, un centre de désintérêt

Congés anticipés, disons plutôt liberté réclamée !  N’est-ce pas ce qui se passe dans les établissements scolaires à l’approche des congés ? 
L’école ivoirienne, socle d’apprentissage est aujourd’hui socle d’aliénation vue la manière, les manigances et méthodes utilisées par les élèves juste pour quelques semaines sinon quelques jours d’absence.
C’est répugnant, écœurant et désolant quand le bilan de leurs actes relève des blessures, nos blessures, celles que nous inflige ce coup de force. C’est à juste titre quand ceux-ci, saisis par les forces de l’ordre ou démasqués par leur propre établissement, fréquentent les Commissariats. 
Des mesures drastiques, il en faut pour la quiétude des établissements des lycées et collèges de la Côte d’Ivoire.

                                                                                                                                       WILFRIED DION