jeudi 18 juin 2020

Reportage: Phénomène des congés anticipés. Dabou, la ville hantée par laviolence des congés anticipés


  Châteaubriand, lun des collèges privés les plus prisés de Dabou nest pas en marge du phénomène des congés anticipés, malgré son paisible et beau cadre, ses bâtiments neufs aux couleurs joviales, sa belle pelouse, et son corps éducatif engagé. Lun des élèves de cette école a été arrêté par la police puis fait prisonnier durant plusieurs jours. Cétait à lissue des manifestations orchestrées en collaboration avec des élèves dautres établissements de la ville pour aller plus tôt en congés, en décembre 2017. 
    Trois ans après, il est exactement midi et le soleil est au zénith quand nous arrivons dans le collège, théâtre des évènements. Des élèves en uniforme, bleu-blanc pour les filles et le kaki pour les garçons, repartis en une vingtaine par classe sempressent de copier les lignes du dernier cours de la matinée lorsque retentit la sirène marquant la fin des cours. Une fois sortis de classe, de petits attroupements se forment par affinité et se dirigent vers le portail principal, dans une atmosphère de cris, rigolades et éclats de rire. Nous avons tendu notre microphone à quelques élèves pour comprendre les manifestations de ce phénomène. « Les congés anticipés nous donnent du fil à retordre, durant toute lannée scolaire. Ce problème nous met en retard sur le programme normal des cours. Parfois, les sujets des examens de fin dannée nont pas été vus en classe à cause des perturbations dues aux congés anticipés. Et, cela dépeint sur les résultats de fin dannée et le taux de réussite aux examens », déplore Dja Victor, élève en classe de 3ème 4, sur un ton à la fois damertume et de colère. Comme lui, certains élèves évitent désormais dêtre des acteurs de ce phénomène et se préoccupent de son impact négatif sur leur cursus scolaire, de même que sur leur vie en général.  
   Cest le cas dOkobé Asy Bala Jeannette, élève en classe de 2ndeA1 : « Jamais je ne serai une actrice ou participante dune manifestation de ce genre. Je ne veux pas risquer ou gâcher ma vie. Mes parents paient cher pour mes études », prévient-elle, en soutenant : « Lun des élèves de ce collège a fait la prison pour avoir participé à une manifestation des congés anticipés. Je ne veux pas finir comme lui !». 
    Ces évènements datent du vendredi 11 décembre 2017. Date à laquelle les acteurs de ce fléau ont pris dassaut les établissements secondaires publics comme privés, à Dabou. Dans leuphorie et lincivisme, ces manifestants se sont mis à déloger les élèves des autres établissements de leurs salles de classe. Munis de gourdins, briques, cailloux et armes blanches, ils détruisaient des biens publics et privés sur leur passage. « Ce jour-là, Dabou était sens dessus dessous, la population ne savait plus à quel saint se vouer à cause de la violence qui régnait sur la ville », se souviennent encore les élèves de Chateaubriand où, tout comme dans dautres établissements, ladministration et certains élèves se sont farouchement opposés aux manifestants. « Etant dans un établissement privé, nous ne pouvons pas permettre une telle attitude chez nous. Et ce fameux 11 décembre, lun des manifestants a eu laudace de porter main à un professeur sans regret », se souvient Camille Lou Rydiouane.
   En dépit de la mise en garde des autorités, de lincarcération de certains acteurs et des pertes en vies humaines signalées dans dautres localités gagnées par ce phénomène, dautres élèves semblent prêts à tout pour récidiver. Généralement ce sont des élèves en classe intermédiaire qui donnent les premiers coups de sifflet marquant le début des perturbations : « Je participe aux manifestations des congés anticipés à chaque fois que loccasion se présente. Cest une manière pour moi de maffirmer et mexprimer en tant que femme. Cest loccasion de nous faire entendre. Mais pas forcément par la voie de la violence. Nous sommes même encouragés par certains membres du corps enseignant qui veulent plus de temps à passer dans leurs familles se trouvant à des milliers de kilomètres dici », confie Ange en classe de 4ème.
   Selon Isaac Makagnon, Educateur au Collège Châteaubriand, « lencadrement de lélève doit être ferme depuis la maison, pour que nous puissions le renforcer une fois à lécole. Pour mieux cerner ce fléau, afin de prétendre y mettre fin, il faudra une rencontre tripartite entre les parents, le corps éducatif et les élèves. Ces parties saccusent mutuellement dêtre le responsable du fléau. Chacun doit mettre balle à terre, pour, ensemble, trouver la solution idoine. Cest lavenir des élèves, des parents, des enseignants et de toute la société qui en dépend ». Pour le moment, Dabou continue de vivre tous les ans dans la hantise des violences pour les Congés anticipés. 
Melaine KONDON

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire